L’opérateur britannique Actis est officiellement sorti du capital d’ENEO. Le Gouvernement camerounais a signé ce 19 novembre à Yaoundé l’accord de rachat, mettant fin de manière anticipée à une concession qui devait encore courir sur cinq ans. Pour reprendre la main sur 95 % du capital de la société nationale de distribution de l’électricité, l’État a déboursé la somme de 78 milliards de FCFA.
Une reprise stratégique pour une gouvernance renouvelée
Le ministre de l’Eau et de l’Énergie (Minee), Gaston Eloundou Essomba, a tenu à lever toute ambiguïté : cette signature consacre la reprise du contrôle par l’État, qui récupère ainsi « la gouvernance et les moyens d’agir » pour restructurer l’entreprise.
Selon le Minee, cette opération marque une « étape déterminante dans la reprise en main du secteur de l’électricité », s’inscrivant dans une volonté de modernisation, de sécurisation et de viabilisation d’un secteur vital pour le développement national.
Les zones d’ombre : 60 milliards de FCFA de pertes

L’État reprend cependant une entreprise en difficulté structurelle, caractérisée par un déficit chronique. Les recettes collectées par ENEO ne suffisent plus à assurer le paiement régulier des producteurs indépendants (Nachtigal, Kribi, Memve’ele), les obligations envers Sonatrel (transport), et les charges d’exploitation.
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La principale « zone obscure » et le plus grand défi du secteur est la fraude, estimée à 15 % des pertes. Le Minee reconnaît que ce fléau représente un manque à gagner colossal de 60 milliards de FCFA… par mois.

À cette fraude s’ajoute l’incivisme des institutions publiques, consommatrices d’énergie qui accusent d’importants retards de paiement, fragilisant davantage la trésorerie de l’entreprise.
Le plan de restructuration : Riguer et compteurs individuels
Pour redresser la barre, le gouvernement arrive avec un plan de restructuration axé sur la rigueur et la transparence :
- * Lutte contre la fraude : Le Minee insiste sur l’éradication de ce phénomène.
- * Normalisation accélérée des branchements.
- * Généralisation des compteurs individuels : Le mot d’ordre est clair : « Chaque consommateur doit avoir un compteur, et chacun doit payer ce qu’il consomme. »
- * Réduction drastique des pertes techniques et commerciales.
Si cette renationalisation est saluée comme un « geste économique » qui engage la responsabilité directe de l’État, de nombreux observateurs attendent de voir l’exécution concrète de ce plan. Actis avait elle-même déploré l’impossibilité de juguler la fraude et l’incivisme des paiements. Le succès de cette reprise dépendra de la capacité du Gouvernement à imposer la « rigueur, transparence et cohérence stratégique » annoncées.




