Dans une déclaration solennelle datée du 1er novembre 2025, Son Excellence Mgr Samuel Kleda, Archevêque de Douala, a adressé un message fort aux Camerounais, aux prêtres, religieux et fidèles laïcs, suite à la proclamation des résultats de l’élection présidentielle du 12 octobre et aux violences qui ont suivi. Ce texte, empreint d’une profonde gravité, se veut un appel à la conscience nationale et un plaidoyer pour un changement radical.
Le « Kairos » manqué et l’indignation populaire
Mgr Kleda a d’abord qualifié l’élection présidentielle de « kairos », un moment favorable pour écrire une nouvelle page de l’histoire du Cameroun : le changement. Il a souligné que le désir de changement est une « aspiration profonde » exprimée par une très large majorité de Camerounais.
Cependant, l’Archevêque a déploré que les réactions aux résultats aient été accueillies par le « mépris et pire encore l’ignorance » d’une majorité. Il a exprimé la « colère » et l' »indignation » d’une grande partie de ses compatriotes, qui se sont manifestées par des marches et des manifestations.
Condamnation ferme de la violence et de la répression
Le prélat a condamné avec la plus grande fermeté les actes de violence post-électorale, notamment les actes de vandalisme, les pillages, les destructions d’édifices publics et commerciaux, et les incendies qui ont causé des pertes matérielles et, plus grave encore, la mort de personnes innocentes dans des villes comme Douala, Garoua, Maroua, Bertoua et Dschang. Il a qualifié ces actes de « déplorables et condamnables ».
Simultanément, Mgr Kleda a rappelé le devoir fondamental de l’État : sauvegarder la sécurité des personnes et des biens. Il a insisté sur le fait que la démocratie « ne s’accommode pas des coups de canons, des menaces, des arrestations arbitraires et des intimidations des citoyens qui ont une pensée contraire. » Il a martelé qu’un gouvernement n’est légitime que s’il gouverne pour le peuple, et pour le « devoir de l’aimer et de répondre à ses aspirations légitimes et profondes ».
A lire aussi CNPS-DGSN: Refus de passeport pour dettes sociales
Les racines profondes du malaise camerounais
L’Archevêque a invité à une réflexion sérieuse sur les « origines profondes de ce malaise » qui pousse les Camerounais à de tels agissements. Il a dressé un tableau sombre de la situation socio-économique du pays, qu’il attribue à la « mal gouvernance »*:
* Chômage et Pauvreté : Un taux de chômage général estimé à 74 % et une pauvreté à 37,7 % en 2024.
* Crises structurelles : Le chômage, l’émigration massive (plus de 6 millions de citoyens sur les routes de l’exil), le déficit énergétique, les injustices, les inégalités sociales, et l’exploitation des richesses par une minorité.
* Insécurité : L’insécurité grandissante et la vie chère.
Il a conclu que cette situation, marquée par la « misère » et la « souffrance », est le résultat d’une « inégale répartition des richesses du pays » et de l’usage du bien commun à des fins égoïstes, créant un « climat social tendu et délétère. »
Appel à l’apaisement et à la conscience collective
En conclusion, Mgr Kleda a appelé à l' »apaisement et la préservation de la paix et de la stabilité ». Il a affirmé que cela passe par une « prise de conscience collective » des différentes crises qui minent le pays. Il a exhorté les dirigeants et le peuple camerounais à se laisser éclairer par l’Esprit Saint pour trouver les solutions appropriées à cette situation critique.
La déclaration de l’Archevêque de Douala, donnée le jour de la Toussaint, résonne comme un cri d’alarme et un appel pressant à la responsabilité de tous les acteurs de la nation camerounaise.




